Moulay Hicham, le prince « rouge » à l’agenda « vert » ?

Depuis le déclenchement du « printemps arabe », le prince Moulay Hicham, cousin du souverain marocain Mohammed VI, multiplie les sorties appelant à une réforme du système. Derrière cette omniprésence médiatique et cette prise de parole volontaire, y a-t-il une volonté réelle de participer aux réformes ou la poursuite d’un agenda personnel ? L’ambition de « servir », il la porte telle une bannière revendiquée qu’il ne manque pas de rappeler à chaque interview accordée-systématiquement- à des chaines d’information ou des médias français, très suivis au Maroc. Que ce soit sur France2, France 24, ou encore TV5 et l’express, le « prince rouge » Moulay Hicham ne manque pas de rappeler qu’il n’est « candidat à rien » et qu’il souhaite conserver son indépendance. Malgré cette neutralité affichée, les cercles de pouvoir de Rabat et Casablanca sont unanimes pour estimer que Moulay Hicham poursuit la même stratégie depuis près de vingt ans : celle qui devrait lui permettre d’exister sur la scène politique de son pays.Tous ceux qui le connaissent et l’on fréquenté sont formels, le prince n’a qu’une seule passion dans la vie : la politique. Tiraillé entre son titre de prince et ses aspirations de participation à la vie publique, il n’a eu de cesse, déjà du temps de son oncle Hassan II, de multiplier les adresses publiques au pouvoir et de se positionner afin de faire entendre sa voix. Pour cela, il n’hésitait pas à signer des tribunes dans des journaux français, dont notamment « le monde diplomatique ».A la mort de son oncle en 1999, Moulay Hicham le « réformiste » qui s’opposait –somme toute cordialement- à Hassan II est ringardisé par le vent de réformes enclenchées par Mohammed VI  et se retrouve très vite en marge du pouvoir, pris de vitesse par un Maroc qui souhaite changer et qui fait bloc derrière le nouveau roi. C’est alors que Moulay Hicham change son fusil d’épaule et prend sur lui de se rapprocher des journalistes, multipliant entrevues charmeuses et assistance financière directe à un petit groupe qui lui est resté fidèle, composé de Boubker Jamaï, Ali Amar du « Journal Hebdomadaire », Ali Anouzla ou encore Taoufik Bouachrine.Au début des années 2000, tous ces journalistes vont entamer une campagne de promotion du prince, qui vise à le présenter comme un « homme qui réfléchit », au dessus de la mêlée, et qui n’est animé que par la passion de servir son pays. En 2003, Moulay Hicham annonce qu’il est lassé des « persécutions dont lui et son entourage seraient victimes » et s’exile volontairement dans sa  luxueuse demeure de dix-huit pièces dans les environs de la prestigieuse université de  Princeton, aux Etats-Unis . L’effet escompté par le prince, à savoir une solidarisation des élites de Rabat et Casablanca ne se produisant pas, l’on assiste à une réédition du processus des années 90 à travers force tribunes et articles dans la presse internationale. En réalité, un virage idéologique est en train de se produire, et le « prince rouge » commence à avoir un agenda qui vire au vert, avec une première tentative de se positionner comme un chantre écologique et un discours islamo-conservateur qui vient flirter avec celui d’Al Adl Wal Ihssane . Aux états Unis, Moulay Hicham est en effet pénétré par les idéaux d’une certaine frange  de l’intelligentsia US, fascinée par l’exemple turc, et qui voudrait que l’islamisme soit assimilable par les pays arabes. Emerge donc la possibilité d’un axe Moulay Hicham Nadia Yassine, évoqué par un certain nombre d’analystes, et que le prince lui-même ne démentira jamais…