Maroc : un TGV pour quoi faire ?

Il ya près d’une semaine, le chantier du premier Train à Grande Vitesse (TVG) en Afrique et dans le monde arabe a été lancé à Tanger par le Roi Mohammed VI en présence du président français Nicolas Sarkozy. Le TVG, qui sera mis sur les rails d’ici quatre ans, reliera dans une première étape la ville de Tanger à la capitale économique du pays, Casablanca. Mais au vu de son coût et des capacités budgétaire du royaume chérifien, ainsi que du timing de sa réalisation, ce mégaprojet continue à susciter nombre d’interrogations. Le futur TGV devrait en effet parcourir les 350 Km qui séparent la ville du détroit de Casablanca en 2h10 au lieu de 4h45 actuellement. S’agissait-il d’une véritable priorité pour le Maroc ? N’aurait-il pas été plus simple de simplement moderniser la rame actuelle ? N’aurais-t-on pu utiliser le financement pour faire d’autres choses ? Ce sont là des questions que nombre d’internautes se sont posé ces derniers jours, et qui nécessitent que l’on s’y arrête quelque peu, maintenant que le feu est un peu retombé. A la première question : est-ce que le TGV constitue une priorité pour le Maroc ?  l’on serait de prime abord tenté de répondre par la négative, mais  l’on oublierait  peut être une dimension importante du projet : le fait que le Maroc se retrouverait leader africain sur la grande vitesse, ce qui permet de positionner le « produit Maroc » comme novateur et audacieux pour les investisseurs étrangers , dont le pays est dépendant pour poursuivre sa croissance (en moyenne près de 3 milliards d’euros par an d’IDE) . Concernant la modernisation de la rame actuelle, il semble à peu près établi que la réfection de la rame aurait couté près d’un tiers du budget affecté au TGV, sans réduire pour autant le temps de parcours, et donc sans apporter d’avantage conséquent.  La question du financement, que l’on aurait pu affecter ailleurs qu’au TGV , est en réalité une Fausse Bonne Idée (FBI), car les financements du TGV, notamment français ou Séoudiens, sont affectés à la Grande Vitesse, et n’existeraient tout simplement pas s’il n’y avait pas eu ce projet. Quant au « solde », réglé par le contribuable, l’on peut raisonnablement penser que le Maroc peut investir près de 700 millions d’euros sur quatre ans pour sa stratégie ferroviaire. Ramené au PIB marocain (près de 80 milliards d’euros), cela fait moins de 200 millions annuels.   De surcroit, il s’agit de la première tranche du schémas directeur de l’Office National des Chemins de Fer (ONCF) relatif à la ligne ferroviaire à grande vitesse qui devrait couvrir d’ici 2035 près de 1500 km à commencer par la liaison Tanger-Rabat-Casablanca pour passer ensuite au tronçon Casablanca-Essaouira-Marrakech-Agadir avant de terminer par la liaison Rabat-Fès-Oujda.Une autre question est venue diviser le internautes ces derniers jours : le fait que la France aie été favorisée pour obtenir ce projet, au détriment par exemple du canadien Bombardier, sensiblement mois cher (du fait notamment de la décote avec le dollar). L’octroi du mégaprojet à la France sans passer par le traditionnel appel d’offre international, a fait plusieurs mécontents au Maroc et à l’étranger. Parmi les 27 pays membres de l’Union européenne, l’Allemagne elle aussi reproche au Maroc, titulaire du statut avancé auprès de l’UE, d’avoir été moins transparent dans la conclusion de certaines transactions à l’international en favorisant son partenaire français. Cette attitude de Rabat, explique en partie la position négative observée par certaines capitales d’Europe qui tentent de faire barrage à des accords (agriculture et pêche) que le Maroc et l’Union européenne s’apprêtent à faire ratifier par leurs parlements. Berlin a également opposé son niet à l’octroi d’un prêt européen de 400 millions d’euros au Royaume chérifien alors que Madrid tente de bloquer à tout prix, la ratification de l’accord agricole Maroc-UE.

Or, pour inciter le Maroc à concrétiser sa commande auprès du groupe français Alstom par l’acquisition du premier TGV, Il faut souligner que la France a fait montre d’une souplesse inédite –certes intéressée car bénéficiant aux groupe de l’hexagone- surtout en ces temps de disette budgétaire. Ainsi, Paris  s’est engagée à  concourir au montage financier du projet à hauteur d’un milliard d’euros, octroyé sous forme de prêt à long terme (40 ans avec 20 ans de délais de grâce) et au taux très réduit de 1,2 %.Au plan national, si du côté financier, les choses se déroulent comme prévu, de l’avis des promoteurs du projet (ONCF et ministère de l’équipement et des transports), l’avancement du mégaprojet butterait encore, selon certaines indiscrétions, sur des problèmes liés au tracé de la ligne du futur TGV, notamment la compensation des propriétaires terriens pour expropriation.

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